"L'apparence n'est rien, c'est au fond du coeur qu'est la plaie" Euripide

vendredi 14 mars 2014

Au bout du tunnel




J'écris mes trous de mémoire en buvant du rosé sur les quais de Seine
L'insolence violente de la brillante jeunesse parisienne quand viens le printemps
On est au coeur de tout. 
Pour désinfecter les plaies en douceur dans la fraicheur du vent du Nord
Au soleil des sentiments, une cicatrice gigantesque au fond du coeur
La bouteille est presque vide, mais parle moi encore,
De cet hiver radieux qui nous a vu éclore, plénitude amusée
Jeunes perchés en technicolor qui marchent souvent sans but
Juste pour vivre un peu plus fort tandis que d'autres s'entravent
On délaisse leurs sens atrophiés la lumière dans la ganache
Les astres nous sourient.
Tu peut rêver tant que tu veux d'une vie normale, 
Sauf que nos regards ne sont pas fait pour le vide, mais pour le ciel
Nos jambes aiment trop la route et cette fois je pars si loin
Le début de l'été séchera les larmes, et peut-être se retrouvera t-on indemnes
Pourvu que l'amour veille sur toi, sans naïveté ni mélancolie
Juste l'espérance qu'au bout du tunnel il y aura quelqu'un. 




jeudi 13 février 2014

Coeur vagabond



Un départ ou un retour, on ne sais plus très bien car le mouvement est permanent quand on a pas de point d'attaches. Alors on se contente de bouger, pour ceux qui restent, on part, pour ceux vers qui on va, on revient. Nous, en réalité, savons que nous ne faisons que fuir. Ne jamais rester trop longtemps au même endroit, c'est la règle pour ne pas se retrouver privé de liberté, attaché, enfermé dans sa propre tête. Nous sommes des gens qui fuient les contraintes, tout en acceptant qu'il est très contraignant de vouloir vivre libre et sans emmerdements. C'est une existence dans laquelle on trouve peu de repos. Partir longtemps, c'est devenir un étranger pour là d'ou l'on vient, presque plus que pour l'endroit vers ou l'on va.
Parfois c'est vraiment dur de partir d'un lieu ou l'on est bien, heureusement, on y est forcés, sinon on resterais statiques au même endroit, histoire de profiter jusqu'à ce que tout s'écroule... Il ne faut jamais perdre de vue que l'on part pour se trouver, aller rechercher les morceaux de soi égarés, dans l'amour de la route, une quête énorme. S'arrêter trop longtemps c'est s'oublier. S'installer c'est se résigner au peu que l'on connait, abandonner tout ce qu'on a jamais vu. Il nous faut pourtant frapper à toutes les portes avant de trouver enfin la notre. 
On part avec des gens qui nous inspire plus ou moins de sympathie et de confiance, ou bien on fait des rencontres dans les détours du voyage, mais le seul compagnon de route sempiternel sera toujours la peur. L'insomnie qui imprègne la mâchoire et la colonne vertébrale, l'angoisse qui fait grincer des dents. L'idée n'est plus de combattre les démons qui nous assaillent, mais de tracer son chemin, droit, en attendant qu'ils se lassent d'y sillonner. Parfois en vivant comme ça, dans un mouvement frénétique et insatiable vers l'ailleurs, on se rend compte que l'on est pas au bon endroit, que nos pas nous on mis sur la mauvaise route, et on est déjà tellement loin. Attendre est la réponse à beaucoup de questions qui ne peuvent trouver la leur dans l'immédiat. 
Les mots d'amour ou de confiance sont souvent impossibles à prononcer, impensables pour des gens comme nous. Nous sommes de ceux qui se contraignent à regarder l'avenir avec patience, dans un monde désordonné, en espérant se faire une place au soleil des sentiments, une place dans un coeur ou peut-être un jour nous pourrons poser nos valises sans nous sacrifier. 


mardi 4 février 2014

Je suis un soir sans toi



Je suis le froid qui accompagne la nuit dans un fin rayon de lune,
Je suis une dune dans le desert qui t'habite au sein d'un grand oubli
Qui se veut rassurant et dénué d'amertume quand le présent se délite
Je suis les rires dans le vent et les luttes qui nous lient
Je suis les cris d'enfants qui viennent nous chercher se croyant tous permis
Vagabonds peu meurtris, Insolents ils grandissent en ayant peur de rien, 
Dans nos matins bien souvent s'imiscent et guident nos lendemains
Je suis les rêves d'hier toujours remis à plus loin, les trêves de nos guerres, 
Je suis nos silences dans le lointain, et nos artêres qui flambent
Je suis le feu qui crame sans peine nos veines et nos poumons
Le poison qui nous gene et tend à nous faire toucher le fond, 
Je suis nos âmes à l'unisson, la déroute qui s'achève,
Le démon qui se perd et nous rend la raison, 
Je suis notre regard qui est fait pour le ciel, je suis la belle étoile,
Les longues aubes sans sommeil et la vie qui se dévoile,
Un bonheur très instable dans l'ennui qui s'efface
Je suis la liberté se voulant insaisissable, la fierté dans nos yeux
Les traces d'un vieux passé laissant peu à peu place
A un avenir patient à l'écart des menaces, 
Je suis la pluie qui nous glace, le soleil qui nous grise
Je suis nos sourires sans remise et le bon temps qui passe
L'amour que l'on attise et nos reflets sereins dans la glace,
Je suis la jeunesse que l'on réveille, la fièvre dans le sang, 
Je suis la haine des gens, je suis un coeur vermeil, 
La paix de ceux qui s'émerveillent, l'espoir dans le néant,
Je suis un soir sans toi sur une route solitaire
Un verre vide aux deux tiers et l'ivresse qui aboie, 
Je suis une rêverie amère et une prière sans foi
 Un bonheur éphémère qui cherche encore sa voie.






samedi 18 janvier 2014

Kilomètres



C'est un départ comme les autres. Il faut penser à tout un tas de trucs, prendre des sacs à vomis pour dans le car, vérifier les étiquettes sur les sacs à dos des enfants, regarder sous leurs lits et dans leurs armoires qu'ils n'aient rien laissé traîner, s'asseoir sur sa propre valise pour la boucler, sortir les draps dans le couloir et plier les couvertures, emmener des bouteilles d'eau et le goûter à prendre dans le train, dire "au revoir merci c'était sympa" au personnel qui était plus ou moins sympa, monter dans le car et essayer de s'endormir au plus vite pour ne pas penser à là ou on va se réveiller. Seulement cette fois la valise était un peu plus lourde que d'habitude, le trajet m'a paru un peu plus long et pénible que d'habitude et j'avais un peu plus de poussières dans les yeux en disant adieu aux enfants, des poussières qui coulent et qui strient les joues comme tous ces souvenirs dont on fait déjà partie pour eux. C'était une arrivée comme les autres, on descend du train dans une cohue pas possible, on recompte les gamins mille fois, on arrive à l'école, il fait déjà nuit et une foule de parents nous attendent prèts à happer leur progéniture, ceux qui nous disent merci comme si on avait sauvé le monde et ceux qui ne nous regardent même pas, ceux qui arrivent en retard et n'embrassent pas leurs enfants, ceux qui râlent... Mais tous ils partent bien vite, emmenant loin de nous leurs gosses sans compter nous les rendre un jour. On le sait pourtant à force que une fois que les enfants ont aperçus leur famille on ne fait plus partie que du passé, un passé très heureux, mais déjà fini et clôturé. Et puis tout ce qu'on a fait avant, les rires, les jeux, les cris, les longues marches, les histoires avant de s'endormir, en marge de l'atmosphère étouffante dans laquelle ils grandissent, tout ça se retrouve relégué au rang de photo sur un CD souvenir qu'on nous enverra par la poste, peut être, si ils y pensent. On le sait déjà avant tout ça, on est prévenu, c'est écrit sur le contrat. On a pas le droit d'être déçus, après tout, c'est des gamins.
Puis il y a les autres aussi, les adultes. Ceux avec qui tu te moque des enfants quand ils sont couchés, rigolant bien fort, sans pouvoir s'en empêcher, ceux qui t'apprennent pleins de choses de fil en aiguille, qui te prennent sous leurs ailes et te guident pour t'aider à avancer plus loin, plus longtemps, ceux qui te serrent dans tes bras quand tu te sens seul parmi tous ces gosses. Dans le monde des grands j'ai jamais trouvé beaucoup de gens qui en vaillent la peine, mais il y a ceux là qui t'aiment sans contrepartie, entier, vivant, avec qui tu regardes les étoiles la nuit sur les balcons de toute la France, et avec qui tu voudrais vivre encore et toujours sans jamais que ça s'arrête parce que l'équilibre est fragile mais parfait. Ces personnes avec qui tu vis peu de temps mais tellement plus fort qu'avec tous les gens que tu as pu connaitre avant. A qui tu ouvres ton âme sans même y prendre garde, ceux qui t'aident à grandir. Et comme les enfants, il faut s'en séparer, car nos routes diffèrent. En acceptant ça tu as parfois l'impression de t'enfoncer des bouts de verre dans le coeur. Des kilomètres de rires qui s'évanouissent dans le fracas de rapides adieux amers.
C'est un départ qui brise un peu, qui fracasse. Les sentiments qui se tordent soudain et puis des larmes pas attendues, pas prévues au programme mais qui sont là quand même. Alors on leur fait une place. On essaie d'accueillir la tristesse correctement puisque de toute manière elle est là. On sait que ça ira mieux, dans quelques jours, quelques semaines. Que d'autres enfants viendront remplacer ceux du précédent groupe puis que petit à petit leur prénoms s'effaceront pour laisser place à de nouveaux. D'autres lieux s'imposeront à nous, d'autres montagnes, d'autres vallées, d'autres centres, toujours entre deux escales à Paris, ou l'on rencontrera d'autres collègues, d'autres adultes... Clope au bec au sommet d'une montagne, se raconter des histoires avec un de mes formidables amis à durée éphémère. J'aime la vie, c'est elle qui m'a amené ici, qui me permet de mettre de côté la crasse de nos existences baclées et défaites. Nous sommes des soldats et j'ai envie de t'aider, envie de t'aimer comme tu le mérites. 


mercredi 1 janvier 2014

Un mental de tigre du bengale




Ici commence la partie ou ça déconne complètement.
On ne comprend plus rien de ce qui se passe.
Mais on continue à faire des choses.
Se débattre contre le spleen.
Contre nous mêmes.

Se laisser diluer dans la magnificence du chaos environnant.
Marcher toute la journée à perte.
Tourner à vide.

On fait saigner ce qu'en nous on a de plus beau.
Une pensée salutaire, un murmure soucieux.
Ce train emmène ce qu'il reste d'espoir,
Loin du chagrin qui règne ici en maitre.
Loin des débris, des erreurs.

La tristesse tente de reprendre le monopole de nos vies.
Elle s'éveille au contact entre deux âmes blessées.
Jaillit des cicatrices et détruit tout.
Inhumaine.

L'espérance laissée pour morte.
Sur une route déserte.
L'enfance rouée de coups.

Renaitre.
Fuir le doute.
Planter des étoiles dans les yeux des gosses.
Trouver un déroulement alternatif au plan initial.
Se sauver.

Se remettre de tout.
Toujours prêts à la riposte.
Les griffes acérées.
Le regard fier.

La solitude deviendra le seul amour possible.
Dans un mutisme absolu.
La peur du ciel.

Un mental de tigre du bengale.




mercredi 25 décembre 2013

Paradis artificiels






En équilibre sur un fil fin comme ce qu'il reste de notre de nos âmes. En face d'un brouillard sombre et épais que beaucoup nomment l'avenir.  Dans les déchirements perpétuels de la drogue qui fait fluctuer tous nos sens constamment. Tels les vaillants soldats que nous essayons toujours d'espérer être un jour, nous évoluons dans une solitude brisante au sein des méandres du spectacle humain qui nous grise parfois le temps d'un parachute de poudre. Ce petit bout de papier qui nous transperce de part en part pour quelques heures ou mêmes jours et dont les effets quels qu'ils soient sont toujours inattendus, nous débusquant violemment hors de nos gardes-fous protecteurs pour nous heurter à la vie. Les pupilles noires comme l'enfer prêtes à exploser, les dents qui grincent et les mâchoires qui craquent sourdement, le corps léger comme un soupir au point de s'envoler mais le pied sur et le sourire inaliénable. C'est une petite mort existentielle, la perfection dans l'harmonie de la chair et de l'âme, et des esprits entre eux au sein de l'amour et du bonheur les plus purs jamais imaginés.
La vie afflue en tous sens dans nos veines dans un élan irrépressible et les plaies sont tout à fait silencieuses sur ce chemin ou nous ne voudrions mourir pour absolument rien au monde. Dans une insomnie délirante et fiévreuse nous sommes ensemble et rien ne nous arrête car nous semblons être plus forts que tout. Et si heureux.
Bien sur le lendemain, et pire encore la semaine qui suit, tout ça est une autre histoire. Il faut réussir à puiser dans le souvenir de l'extase de quoi pardonner la vie de ne pas être autrement. Trouver de l'espoir pour de meilleurs demains quand bien même on est conscient qu'on a déjà vécu un des moments les plus absolus que peut procurer l'existence. Se contenter d'être reconnaissant de l'avoir connu et regarder autour de nous ce que cela peut nous permettre de créer aujourd'hui, sachant que l'on revient d'un monde infini et sans limites que peu on eu la chance de même frôler. Permettre à l'amour de prendre place en nous et de remplacer la drogue.
Soyons de ceux qui s'aiment sans le faire savoir car les langues qui se délient dérangent. Dans les replis du vice nous sommes indécents de gratitude et mués par une passion furieuse mais tout cela dans un silence total. Nous serons un secret dans le bruissement diffus des rires, les froissement de la flamme, nous serons notre propre miracle, notre propre paradis.


dimanche 15 décembre 2013

Le pardon



"Seigneur, veuillez pardonner mes péchés sur cette Terre,
J'avais pourtant juré, juré de ne pas me laisser faire
Seigneur, veuillez pardonner cette fierté qui me froisse, 
Qui prend place, qui m'empêche de me regarder dans la glace." 


Saurons nous aller chercher le pardon au fond de notre cœur pour réussir à nous accepter au delà de l'image d’Épinal utopique, sans failles? Arriverons nous à surmonter les folies passagères qui nous prennent et nous poussent à nous meurtrir sans vraiment le vouloir? Parviendrons nous à faire face aux dégâts causés de nos propres mains, dans un possible sursaut de légitime défense ou de sang froid? C'est un sujet qui intéresse peu de gens pourtant il partage quotidiennement la notion d'amour, qui parfois prend trop d'espace. Quand il en est question les sentiments paraissent souvent être de doux rêves qui laissent une amère sensation dans les bris de confiance. Cependant pardonner n'est pas se voiler la face ou s'aveugler pour se permettre de croire encore à l'illusion de l'espoir. Excuser celui qui nous a blessé n'est pas preuve de faiblesse. Pardonner c'est admettre que l'amour peut encore être merveilleux malgré les trahisons, se relever d'un air courageux et avancer à nouveau sans vaciller.  Le pardon est une vengeance sur la peur et la tristesse, une revanche contre l'erreur. Les errances d'amour dans les caprices de l'obscurité peuvent entraîner un avenir de ressentiment et de vengeance. Encore faut il se repentir et apprendre de ses torts sans oublier. Malgré la blessure.
La liste des choses à nous faire pardonner est longue mais maintenant la première chose me parait déjà être de tenter de nous excuser nous mêmes. On se rappellera toujours de combien on a souffert et dans le fond le pire fut de savoir que c'était notre faute. Nos mauvaises actions auront des conséquences directes, peut être que ce ne sera plus jamais la même chose. Peut être qu'on souffrira encore. Mais peut être aussi qu'on sera meilleurs, grandis, avec la fierté de ceux qui sont parvenus à traverser les épreuves avec sagesse, qui n'ont pas attendu que tout soit gaché pour se repentir et pardonner. Dans une de ces marches nocturnes tant attendues profiterons nous de la douce accalmie qui vient après le pardon, la certitude d'être au bon endroit, au bon moment ?



jeudi 5 décembre 2013

Sainte tristesse




Cette période affreuse de l'année ou les jours diminuent de durée inlassablement est bientôt terminée cependant le froid s'accentue insidieusement, les rues semblent  si tristes partout ou je vais. Le soleil se couche tous les après-midis dans un ciel sanglant, flambant insolemment derrière des arbres nus et maigres, telle la lueur d'espoir qui s'éteint pour laisser place au doute et à l'obscurité tranchante de la nuit. J'ai roulé pendant des heures et des heures dans ce noir total en espérant pouvoir oublier la comédie insupportable des relations humaines qui me heurte en permanence, rêvant de l'amour comme guérison. Triste enfant idéaliste, à qui rien n'appartient, vagabonde au possible.

Je crois que l'on peut endurer beaucoup de choses très longtemps tant qu'un peu de merveilleux brille derrière et devant nous. Derrière car il faut l'avoir connu pour y croire, et devant car il faut perpétuer l'espoir de connaitre ce merveilleux à nouveau. Cependant quand le poids de nos erreurs vient souiller les souvenirs de cet absolu et rend impensable la possibilité que cela se reproduise à nouveau, tout ce que l'on subit depuis très longtemps sans desserrer les dents devient absurde à nouveau. Pourquoi se lever le matin ? Pour quoi faire ? Qui m'attends ? Tout est redevenu abscons, idiot, terne. Tous ces efforts que l'on déployait sans ciller du matin au soir, tout ça parce qu'on avait un but, ou plutôt quelque chose à quoi se raccrocher, paraissent désormais vains. J'ai le sentiment d'une grande dégringolade au sein d'un esprit désordonné, la réalité qui prend à nouveau ses droits et rappelle l'homme à sa condition fragile. Vivre se résume à subsister. La sérénité devient proscrite. Votre coeur vous tient lieu d'âme, et votre âme saigne comme un coeur.


dimanche 17 novembre 2013

Légitime défonce



Cette fois ci c'est la dernière fois. La dernière fois que je perds mon temps sur le balcon en pleine nuit, dans le froid polaire de l'hiver qui s'installe, la dernière fois que je me noircis les idées et les poumons dans le craquement d'une allumette, que je rentre la pupille dilatée et le blanc de l’œil strié de zébrures écarlates, la dernière fois que je sentirai la nausée affluer en moi dans les relents de tabac froid ainsi que la brume paisible qui lui est liée. Le dernier joint. Après trois ans d'amour je me sépare de mon plus grand compagnon de route, cette herbe qui m'a tant apaisée lors de mes soirées solitaires, permis de faire tant de rencontre et de nouer de si solides amitiés, autorisé à m'endormir pendant les longues nuits d'insomnies. Pendant longtemps la vie a été si triste qu'avoir les dents un peu plus jaunes ou la gorge un peu plus enrouée était le moindre de mes soucis. Ce qui est bien avec la drogue, c'est qu'elle te permet d'oublier tes problèmes car elle devient ton seul problème. Tout le reste parait dérisoire par rapport au fait de pouvoir se procurer assez de produit pour se défoncer. Elle éclipse tout le reste avec une aisance déconcertante. Elle est remède à tous les maux : angoisse, ennui, tristesse, peur, chagrin. Elle ouvre des horizons de pensée au gout infini insoupçonnable pour les sages abstinents, et emmène de l'autre côté de la terre seulement en fermant les paupières. Elle entraîne un état absolu et singulier ou toutes les forces en l'être s'équilibrent et libèrent l'imagination dans une espèce de hantise intermittente. Elle ouvre l'âme dans toute sa magnificence et sa cruauté, mais trop souvent la laisse livrée à elle même, à vif. Le piège est là. Alors même qu'on se prépare à tracer son chemin on se trompe déjà de route. Malgré la prétendue acuité de pensée et cette volupté qu'elle nous offre, la drogue nous fait petit à petit perdre l'espérance d'une vie meilleure qu'elle avait elle même créée. On se lasse de tout car tout devient trop dur. On a de plus en plus de difficultés à atteindre les paradis artificiels, les doses de produits se font de plus en plus conséquentes et de plus en plus chères. On s'isole dans une ascèse enfumée en regardant sa santé patiemment se détériorer, oubliant rendez vous, anniversaires, cours, entretiens, hygiène, famille, société. On appelle moins ses amis, on en a de nouveaux : la paranoïa qui nourrit généreusement des angoisses très vives, la faim qui peut se réveiller à toute heure du jour ou de la nuit associe à de grands maux de ventres, et autres nausées, des stylos, et une feuille trop souvent blanche. Car quand bien même elle stimule l'esprit, elle ôte quasiment toute possibilité de créer. On dit que tout fumeur passe une étape quand il fume son premier joint en solitaire, mais qu'en est-il de celui qui crame dix pétards par jour depuis plusieurs années ? A ce stade là, le crane commence à abriter des zones vides. Des souvenirs s'effacent et demeurent introuvables. On a le sentiment de vivre dans son propre monde créé de toute pièces, de ne pas appartenir à la société. Il devient difficile de garder le fil de ses pensées dans des situations complexes, on commence à parler aux autres et plus avec eux. On dépense des milliers d'euros par an pour une béquille instable. Je ne peut plus vivre à ce rythme, donner autant à quelque chose qui me détruit petit à petit. Tant d'autres me l'ont dit avant, tant d'autres en sont revenus et en sont fiers. Je suis tombée bas, je dois désormais me donner le moyen de remonter. Alors ça commence demain et ça s'annonce pas facile de se confronter à la réalité à nouveau. Mais on a déjà surmonté tellement de choses, on arrive de tellement loin et on a tellement de courage, avec juste un peu de réconfort, tout est possible.
Et j'ai fumé ce joint dans le froid sur le balcon en pleine nuit, comme d'habitude. Mais avant de le jeter dans le vide, je lui ai dit "toi, tu es mon dernier joint." Je sais que ça ne l'est surement pas. Mais le dernier avant longtemps.


vendredi 8 novembre 2013

Prémices

Vue du quai Saint Pierre, Toulouse



Dans l'hiver qui s'installe
Les âmes ondulent et se sourient
Une main glisse sur une joue
Silencieuse et patiente.

Les autres semblent juchés sur des perchoirs inatteignables. 
Nous on est deux aux prémices d'un tout nouveau bonheur
Alors qu'on foirait tout ou presque
Outrageusement heureux.

Des kilomètres avalés pour te retrouver
Mais si un jour je me perds,
M'attendras tu ? 




dimanche 3 novembre 2013

Splendide cruauté




On emmerde la décence, dans la splendide cruauté de notre jeunesse. Nos rires leur percent les tympans, ça leur retourne l'estomac quand nous c'est seulement l'alcool qui s'y agite pour parfois en ressortir dans un sursaut d'inquiétude fébrile. Forcément c'est plus simple quand on se fout de tout, quand plus rien n'a de prise sur nous, quand toute la vie n'est qu'une grande fuite vers l'avant au travers de vastes montagnes. J'espère en parcourir le plus possible avant de te revoir pour pouvoir te raconter tout ce que j'ai vu et comme c'était beau, s'évader dans la nuit tragique. On ne cherche plus les réponses car on a compris que les questions changeaient en permanence, les chimères deviennent parfois réelles, et nos reflets paraissent sereins face aux nuages qui nous menacent. Et si un jour la pluie vient ternir nos cieux c'est qu'il sera temps de prendre les valises à nouveau, d'aller voir jusqu’où la liberté peut nous mener. Mais on a pas peur des orages.

"Aimer ce n'est pas renoncer à sa liberté, c'est au contraire lui donner un sens. Il n'est aucun véritable amour qui ait empêché quelqu'un de suivre ses rêves, dit le maitre. Seules les grandeurs des passions peuvent détourner le coeur qui poursuit son but, l'amour quant à lui sera lumière au loin dans l'obscurité permettant de garder espoir jusqu'au lever d'un nouveau jour. Il sera un Eden dans la sécheresse des chemins arrides, refuge les hivers froids et avides de dureté. Une escorte qui protège et réconforte, et non un maitre exigeant, égoïste ou possessif. Un amour qui ne peut naitre que dans la solitude absolue de l'ame mise à nue et qui s'impose comme une évidence dans un esprit clair et sans amertume. Un amour qui ne connait pas le deuil et pour lequel il n'est pas nécessaire de faire des concessions puisqu'il va de soi. Il est le geste de courage qui nous permet de découvrir toute l'étendue de notre liberté."



vendredi 1 novembre 2013

Amnésia




Seul, 
quand les formes et les couleurs se mélangent, 
dans l'hallucination que t'offre la fumée
dansant devant tes yeux plissés
tu frémis dans ta quête d'une dernière étincelle
et ton corps s’enivre.
Tu tentes de prendre ton envol, 
Au travers des bruits diffus, des cris, des rires, 
Des élucubrations d'un monde confus. 
Oublier les lésions, neutraliser l'alarme,
trouver l'inspiration si bien camouflée,
resplendir au sein d'une grande douleur, 
tant de raisons de céder au soupir en suspens
auquel tu finis par succomber.
Tous les soirs.
Depuis si longtemps.