"L'apparence n'est rien, c'est au fond du coeur qu'est la plaie" Euripide

samedi 24 juin 2017

Ma putain de carte Pastel





Hier j'ai retrouvé ma carte Pastel. Ca faisait un an que je la cherchais, pour prendre les transports à Toulouse, ma putain de carte Pastel. J'ai du en payer des tickets de métro parce que je ne la trouvais pas et que j'avais la flemme d'en refaire une. J'avais abandonné mes recherches depuis un certain temps, je ne m'y attendais plus, je pensais que c'était fini, ça m'a fait un choc de la voir, petit carton bleu dans un étui plastique épais, avec une photo dessus, une photo de ma tête d'il y a trois ans, quand j'ai fait faire ma carte Pastel.
C'est en cherchant autre chose, car c'est toujours comme cela que les histoires commencent que je l'ai trouvée tout au fond d'un grand tiroir à Versailles, avec plein d'autres choses que j'avais oubliée depuis longtemps également. Il y avait dans ce tiroir une dizaine de dossiers de toutes les couleurs avec écrit en gros dessus « Important » et que je n'avais pas touché depuis des années. Je ne me souviens plus ce qui peut être si important dans ces dossiers. Il y avait aussi du maquillage, je pensais que j'avais tout jeté ; depuis le temps. Des mots d'anniversaire de ma grand mère, des dessins d'enfants, des vieux contrats de travail, des cartes de Barcelone, de Sanary-sur-Mer, de Rome. Des brochures d'endroits ou j'aurais voulu mais ou finalement j'ai jamais foutu les pieds. Des feutres fins et des Posca, de quand je passais mes journées à dessiner. Et tout un tas de conneries dont je ne savais pas vraiment quoi faire mais que je n'avais pas voulu jeter : des pierres de volcans, des sachets de thé, des crins de cheval, des autocollants, des bouts de papiers...
Qui a mis tout ça dedans ? Est ce que c'est moi qui ai tout entassé et fermé le tiroir très vite, pour cacher ma carte Pastel en dessous et ne jamais me rappeler ou elle était ? Est ce que c'est ma grand mère qui a voulu m'aider à ranger et qui s'est un peu plantée ? Est ce juste le temps qui s'est chargé de réunir tous ces objets dont je suis le seul lien, de les mélanger et de les vider de sens ?

J'aurais pu t'appeler avec un accent de triomphe dans la voix pour te dire que ça y est j'avais retrouvé ma putain de carte Pastel et que j'allais à nouveau pouvoir prendre le bus pour quedalle, mais je l'ai pas fait. J'avais pas envie de t'appeler et puis je me sentais pas du tout triomphante. Je me sentais triste, dans les roses, avec le sentiment d'avoir encore raté quelque chose. Avec ma putain de carte Pastel dans la main et une grosse boule dans la gorge je me demandais pourquoi j'étais à Versailles, parce que ma carte Pastel ne me servait strictement à rien ici, à part à craner devant les gens et à dire « ouais moi j'ai une carte Pastel » mais à Versailles les gens s'en foutent, ils ne savent même pas ce que c'est. Je me suis demandée quand est ce que j'allais pouvoir rentrer à Toulouse pour m'en servir de ma putain de carte Pastel, et je n'ai pas trouvé de réponse, ça m'a donné envie de pleurer. Je me suis dit que c'était bien la peine d'avoir une carte Pastel si c'était pour ne pas s'en servir quand on en avait besoin, et de la retrouver une fois qu'elle était complètement inutile.

Je me suis rendu compte qu'avoir une carte Pastel soulevait beaucoup de questions auxquelles je n'aurais jamais pensé et était accompagné d'un sentiment de peur très vif. Cette peur, que j'avais cru vaincue, piétinée, écrasée, détruite par la force de mon intelligence et de mon courage, la peur de perdre, la peur d'être seule, la peur d'échouer, la peur d'avoir tort, la peur de souffrir, la peur d'être malheureuse, la peur, quoi, et bien cette peur n'avait jamais disparue. La peur était depuis tout ce temps cachée dans le fond d'un tiroir à Versailles à côté de ma putain de carte Pastel. 



dimanche 28 mai 2017

Fils de connard

Fils de connard.
Je ne sais pas trop ce que je ressens. J'ai l'impression que mon sang a cessé de couler à travers mes veines, que mon coeur a cessé de pomper un instant. Je descend de la voiture, je lache "bonne journée", je prends mon sac à dos et je claque la porte.
Gros fils de connard.
Quand la main s'est posée sur le haut de ma cuisse, la réaction a été épidermique. J'ai pris la main et je l'ai balancée loin de moi. La main est revenue. J'ai gueulé "non!".
Le propriétaire de la main a dit : "allez quoi ! on peut s'envoyer en l'air."
Je suis complètement incrédule. Je ne peux pas croire que ça se passe comme ça, que c'est en train de se passer.
J'ai répété : "non", plus fort. J'ai joint mes mains et les ai posé sur mes genoux.
"Mais ça va, allez, on est bien, j'ai envie moi. T'es bonne."
Je ne bouge pas, je ne dis rien, mais tout mon corps est en alerte.
"Pff ok, mais bon faut me comprendre, c'est tentant. Faut pas se vexer pour ça hein. "
Fils de connard.
"C'est tentant quand même."

Je sors de la voiture.
J'ai rien putain.
J'ai rien, j'ai rien, j'ai rien. Il ne m'a rien fait.
Mon sang recommence à traverser mon corps par à-coups.

Mille pensées me viennent. Qu'est ce que j'aurais du faire ? Je ne l'ai pas insulté. Je ne pense pas que ça aurait changé les choses. Je n'ai pas essayé de lui faire la leçon. Je pense que quand on a cinquante balais passé on SAIT que ce n'est pas une chose à faire de toucher une fille sans lui demander quand vous êtes tous les deux seuls dans une voiture qui roule à 90 km/h. Je pense que tout le monde le sait en fait. C'est juste qu'il s'en fout, c'est pas possible autrement. Je ne vais pas essayer de l'éduquer, de lui expliquer pourquoi c'est mal. Je ne lui ai pas dit ce que je ressentais. Je ne lui ai pas dit que je me sentais humiliée, incomprise et en danger. Je n'ai pas fait un scandale, je n'ai pas crié, J'étais en colère, mais surtout j'avais peur.
 J'ai juste dit non. J'ai été claire. J'ai gardé mon calme, j'ai dit non et je suis sortie de la voiture dés que j'ai pu. Qu'est ce que j'aurais du faire ? A mes yeux, après avoir revécu cette scène de nombreuses fois dans ma tête, je ne vois pas. Et pourtant j'aurais voulu faire plus. Ne pas laisser passer. Ne pas être silencieuse. J'ai crains pour ma sécurité, j'ai eu peur d'envenimer les choses.
Je n'ai rien dit. Je n'ai pas demandé ce qu'il se passait dans la tête de cette personne pour croire que j'avais envie de coucher avec un mec qui a l'age de mon père que j'avais rencontré cinq minutes plus tôt sur la nationale entre Rodez et Albi. Je n'ai pas demandé qu'est ce qui avait pu lui mettre l'idée en tête que toucher comme ça le corps d'une fille à laquelle on a dit trois mots dans une voiture qui roule à toute vitesse c'était bien.
Je ne lui ai pas envoyé une grande gifle dans sa sale gueule de fils de connard.
Qu'est ce que j'aurais du faire ?

Et puis : qu'est ce qui se serait passé si il avait insisté ?


J'ai repensé à tous les gens qui disent que le féminisme en France c'est abusé, que la condition de la femme va très bien et que faut pas déconner. J'ai pensé qu'on vivait dans un pays, dans un monde ou on pouvait toucher une fille dans une situation de faiblesse démesurée et qu'il ne se passerait rien parce qu'il ne pouvait rien se passer. J'ai pensé que beaucoup d'hommes ne ressentirais jamais la peur physique et intense de sentir un autre corps rentrer dans le sien de force.

J'ai pensé que j'avais beaucoup de chance.
Et que j'étais terrifiée.







lundi 15 mai 2017

Partager le silence





"Et vivre à la belle étoile avec la femme que l'on aime est de toutes les vies la plus totale et la plus libre." Stevenson 

 Dans les rues froides, c'est l'hiver, non c'est le mois de mai, et qu'importe après tout ? si la vie n'est qu'un enchaînement de jours sans toi, si les seuls à me juger seront des dieux qui n'existent pas. Je ne t'en veux pas pour ton silence, je ne t'en veux pour rien. Le silence c'est ne pas laisser les mots tout détruire et à la fois c'est se convaincre soi même. Etre seule, écouter le silence, ça m'a terrifié pendant longtemps, aujourd'hui c'est une nécessité. J'ai besoin d'être seule comme j'ai besoin de dormir. Mais ce que je voulais t'expliquer, c'est qu'on pouvait partager le silence. Est ce que je m'accroche à une vieille idée ? Je te propose de partager le silence avec moi.

Je veux réussir à décrire ce sentiment avec des mots exacts, précis, être capable d'expliquer ce qui se passe à la respiration près. Partager ce sanglot de bonheur, qui roule à l'intérieur de mon ventre la pointe de sel qui me transperce l'oeil, la canine qui cloue le coin mes lèvres dans un vif entêtement. C'est plus fort que tellement de choses, c'est tellement fort que si on m'avait dit que ça existait, j'aurais rigolé, ou je me serais mise à pleurer, ou à insulter mon interlocuteur. C'est un bruit sourd à l'arrière de la nuque, point de départ de la moindre de mes sensations, un bruit sourd obsédant et toujours présent. C'est mes tatouages sur les poignets, l'aiguille qui raconte, sans les mots, juste tout le reste, absolument tout. Le silence que je te propose, c'est la vérité la plus précise du monde, de celle qui ne se trahit pas. Un silence qui dénoue, pose tout à plat et donne du sens, explique, ne juge pas. Un silence qui est aussi grand que combien l'on est capable d'aimer.

Partager ce silence, avec toi, qui connait la part de moi que j'élude par peur de la rencontrer au détour d'un chemin, qui respecte le moindre de mes mouvements au point de me voir disparaître par instants, c'est atteindre la forme de solitude la plus parfaite qui soit; seule avec toi c'est être seule avec moi en entier.





jeudi 30 mars 2017

Marcher



J'ai l'impression que si je m'arrête de marcher, je vais crever instantanément. Marcher, pour rien, vers rien, marcher comme ça, sans s'arrêter, sans regarder les paysages, forcer mon corps à m'obéir et m'émouvoir de tout ce que celui ci est capable d'accomplir alors que mon âme ploie sous la tristesse et l'incertitude. Impossible de savoir ce que je veux faire, impossible d'avoir la conviction que la décision horrible que je prends aujourd'hui me permettra de construire un meilleur demain. Chaque pas, par contre, chaque putain de pas est ardemment désiré, c'est moi qui décide, un pied devant l'autre et voilà, je marche, et l'air de rien, j'avance vers ce lendemain résolument, puisque, de toute façon, il n'y a pas le choix. Marcher, bien sur, c'est pas forcément avancer, mais c'est mieux que rien, mieux que rester là, à regarder ce que j'ai construit de mes mains pourrir et me tomber dessus, me fracturer le crane. Alors, je marcherai, aujourd'hui, demain, jusqu'à en avoir mal aux genoux, jusqu'à ce que mes pieds saignent, jusqu'à être capable de ne pas crever si je m'arrête.






lundi 13 mars 2017

Les murs blancs




J'ai balayé mon passé en ouvrant cette porte et en tombant nez à nez avec ces murs blancs. J'ai compris que les lieux aussi s'attachent aux personnes et qu'il ne faut pas les laisser seuls trop longtemps, mais c'était trop tard car j'avais juste ces murs blancs devant moi. Pendant quelques minutes j'ai eu beaucoup de mal à retrouver mes esprits. A comprendre qu'il n'y avait plus aucun lieu au monde que je pouvais appeler "chez moi". Que les murs que je considérais comme tels avaient fait le choix du vide et que je ne pouvais pas leur en vouloir, déjà parce que j'avais décidé de ne plus jamais en vouloir à personne, et ensuite parce que je comprenais le besoin de vide. C'est comme ça qu'on essaie d'oublier l'absence, supprimant tout ce qui rappelle la présence. Les murs blancs, ce n'est plus mon absence, c'est l'absence tout court.
Je suis revenue pour retrouver cet endroit, et je ne le retrouverai plus jamais. Je ne suis pas triste car j'ai aussi décidé de ne plus jamais être triste. Je me sens extrêmement libre au point que c'en est presque indécent. Je ne peux pas vivre entre des murs blancs. Je ne peux pas vivre dans l'oubli de mon absence. Maintenant que je ne vis plus ici, je peux vivre partout. Je vis de toute ma présence, peu importe ou je suis, peu importe le blanc des murs, je me souviens de tout.





jeudi 24 novembre 2016

Bon vent




J'ai trouvé la liberté dans les crins d'un cheval qui virevoltaient dans le grand galop me portant à travers les Cévennes.

J'ai trouvé quelques minutes de paix en haut de montagnes démesurées dont l’ascension douloureuse valait bien plus de mille fois la vue que j'y ai trouvé.

J'ai trouvé tant d'amour et de rires au fil de tous mes séjours avec des enfants, au rythme des jeux, des rires et des découvertes.

J'ai trouvé des amis et des personnes tellement incroyables que parfois j'ai encore du mal à croire à tous ces souvenirs hautement riches en couleurs et en aventures.

J'ai trouvé de la bienveillance partout ou j'ai eu l'occasion d'aller, le plus souvent sans même la rechercher.

Peu importe la désapprobation, empreinte d'amour et d'inquiétude, probablement, de ma famille, car je n'aurai de cesse de leur expliquer que je m'enrichis de ces expériences et pas de l'argent qui gouverne leur vie en grande partie.

Que tous les dangers m'attendent au seuil de ma porte, alors autant les braver heureux et libre.

Peu importe la peur qui tente de m'étreindre quotidiennement, l'incertitude de mes lendemains, le vieux syndrome d’échec si bien connu depuis toutes ces années qui ne me lâche pas et refait surface systématiquement à chaque difficulté.

Peu importe toutes les désillusions, les faux pas, les moments de perdition et les peines.

Désormais j'attrape ma peur et la berce au creux de moi en lui intimant avec indulgence de se calmer. Je n'ai aucun cas de conscience ni aucune difficulté à aller chercher de l'aide quand j'en ai besoin, et j'en ai eu souvent tellement besoin

J'accepte le contrat qui me mène à l'autonomie et au savoir avec son lot de tristesses et de renoncement. Je ne sais avec certitude ce qu'est le bonheur mais je pense pouvoir affirmer que je m'oriente vers lui, à tâtons et avec acharnement.

Les séparations sont terriblement difficiles mais certaines retrouvailles sont une des plus belles choses qu'il m'ait été donné de vivre.

Je suis partie il y a longtemps, mais la différence est qu'aujourd'hui je ne fuis plus. Je me construit, brique après brique, et je souhaite du plus profond de moi même, ne jamais cesser d'apprendre.



"Et à ceux qui mettent les voiles, car ils savent qu'ils ont quelque chose à découvrir au delà de l'horizon, on peut seulement leur dire "Bon vent" "


samedi 1 octobre 2016

ébriété





j'en attendais pas moins de toi
Ça peut être positif ou négatif selon la manière dont s'est dit
J'aurais raté ça pour rien au monde
j'avais sans doute trop bu
mais je ne voulais pas le réveiller
de son profond sommeil

J'en attendais pas moins de toi
c'est dur de comprendre que tu as compris
si je ne comprends pas moi même
je pars
je pars pour toujours ou presque
Six mois
une infinitude

Six heures du matin
Je suis épuisée
et je n'ai pas avancée dans ma compréhension de quoi que ce soit
Rien compris
Tant pis


Et toutes les photos sur les murs que je ne pourrai pas emmener quand je serai partie
C'est bien il faut s'en foutre
Ne pense qu'à toi ça ira bien
Je suis épuisée
et je ne dors pas
je compte les jours


Vas t'allonger
quand bien même tu ne dormiras pas
et le bruit de sifflet dans la tête
mais pas question de le réveiller
lui qui dors loin du chaos
utopiquement
comme si ça allait aller mieux demain
tant qu'il y croit
je ne peux pas
le réveiller


Je pars,
Si je le dis à tout le monde c'est pour y croire moi même
Je pars
J'ai mon billet
Je pars, loin de lui
loin d'eux
je pars toute seule
Oui jai de la chance, oui youpi
La peur  me paralyse mais bravo
Allons y
Allons voir ce qui se passera
Quand je partirai enfin


Je pars et je ne dis rien
a part que vous allez me manquer
que j'ai tellement d'amis qui vont me manquer
Mais je ne le dis pas vraiment
ils sont juste là
et ils disent qu'ils sont contents pour moi
cest ca les amis
et sans doute que quand je reviendrai ils seront toujours là
les amis


je pars
et je suis terrorisée
d'aller aussi loin des gens que j'aime
mais je pars quand même


dimanche 18 septembre 2016

Paris la pluie




Six heures de train
Et Paris, la pluie
Le Ricard, trois quarante
Antonin aux platines
La musique qui effleure
Le clic clac des photos
qui se souviendront pour nous
De ce jour ou
je suis là
Tu souris
Je me rappelle très bien
Pourquoi je suis partie
Paris, la pluie
La musique, 
j'y comprends rien
Je danse pas
Envie de rien
Sauf de te voire sourire 
encore. 

Paris, la pluie,
La vodka, huit cinquante
Et la nuit détrempée
Chaussures léopard
Glissant sur les pavés
Poule mouillée
Qui vole pas
Poule plumée, elle a froid
Pas faite pour vivre ici
Dans la violence de tes sourires
Toi tes yeux ta musique
Moi ma fuite 
et mon amour
et toute ma vie
Paris, la pluie
Je me rappelle très bien
Pourquoi je suis partie. 



mardi 14 juin 2016

Horizons




Et cent ans après on se réveille hébété,
terrifié à l'idée de perdre toute sa vie
Alors qu'on avait tout quitté avec courage
Pour se ressembler enfin, 
Pour être soi
Et nous y revoila.
On s'est aimés sans raisons,
peut-être aurions du nous quitter pour la même.
Car plus la liste s'allonge plus le poids nous pèse
et plus il devient difficile de s'envoler.
Nous qui sommes si nuls au sol.
Pourquoi on attends toujours d'être mal pour se sauver,
pourquoi on passe tant de temps à de dire
"pour l'instant ça  va, c'est ça le plus important"
Alors qu'on sait pertinemment qu'en raisonnant ainsi
on cloture nos horizons à la longue.
T'inquiètes je m'en vais, on se revoit pour les vacances
Pense à envoyer une lettre ou deux,
C'est tout ce que je demande
A quel point je t'aime, si tu savais
Mais si j'étais si merveilleuse, t'aurais pu venir me chercher...

T'es beau comme le couteau que tu pointes sur moi,
quand tu dis que tu vas me tuer,que tu sais pas trop pourquoi,
T'es beau comme la défaite et comme le vide
Quand je m'allonge sur toi et que je m'endors sur ton bide
T'es beau comme la clémence dans tes yeux 
Quand il ya de la démence dans les miens
T'es beau comme la défonce, comme une journée sous les draps
T'es beau comme un premier jour de vacances
Comme tous ces mots que je ne trouve pas
comme un bateau amarré sous un feu d'artifice
Et deux gosses de 18 ans à peine
Qui ne le savent pas encore mais qui s'aimeront longtemps comme des fous
 puis finiront par tout gacher. 






vendredi 27 mai 2016

Le héron de Amsterdam





Amsterdam. Il fait nuit et je suis seule. Une redescente d'une violence vibrante et agréable d'un tout premier trip aux psychédéliques me ramène dans un monde monstrueusement vide et plein en même temps. Les lampadaires immenses reflètent leur lueur sur les canaux tellement paisibles qu'on pourrait croire des miroirs. Je décide de marcher jusqu'à comprendre quelque chose.
Chaque pas sensé me ramener à moi même par la force des choses et de l'habitude ne fait que m'éloigner physiquement de chez moi. J'ai marché pendant plus d'une heure, les sens en veille, et me suis arrêté en me rendant compte que j'étais déjà très loin et que je ne pouvais pas espérer de mon corps qu'il continue sa route et revienne sur ses pas plus tard. J'étais sur un grand quai, d'une géométrie exemplaire, qui donnait sur la mer. J'avais peur mais je ne savais pas de quoi, comme ça m'arrivait souvent à cette période là, quand je n'avais pas encore compris que les choses les plus sombres qui me terrifiaient étaient profondément ancrées en moi même. Et sur ce quai gigantesque ou ne se trouvait pas un seul bateau ou âme, j'ai été frappée par ce grand lieu commun qu'est l'absence totale de sens. Tout était plus que jamais désespérément vide et plein.

J'ai pris le chemin du retour, ma peur sous le bras, les jambes alertes mais un peu fébriles. Les méninges crispés toujours dans cette même volonté de comprendre qui n'aboutit pas.

Je me rappelle avoir écouté High Voltage Queen sur la fin du trajet et y avoir pris un pied absolument incroyable que seuls peuvent comprendre ceux qui ont vécu l'association virulente de drogue et de musique, capable de remuer, indomptable, tout ce qu'on a soigneusement enfoui dans les tréfonds de notre inconscient depuis si longtemps. Jamais les tremblements de cette chanson ne cesseront de parcourir ma peau, comme l'application ferme d'une loi juste. Jamais je n'oublierai la rue déserte et droite qui menait jusqu'au terrain de basket devant la péniche ou nous habitions depuis quelques jours. Tout transpirait une sérénité absolue dont je m'imprégnais sans tenter de le faire, la musique obsédante s'occupait de tout, il n'y avait plus besoin de réfléchir. Tout allait bien.

J'ai grimpé sur le pont de la péniche et suis tombée nez à nez avec un héron qui avait l'air habitué des lieux. On s'est regardés pendant quelques temps, parfaitement calmes, lui lissant ses plumes et vaquant à ses activités d'oiseau, et moi roulant un joint, nous faisions partie du même monde, on ne se dérangeait pas, silencieux. Au petit jour, je suis allée réveiller L. pour partager avec lui la douceur de cet univers que je découvrais petit à petit, qui cependant avait probablement toujours été là. Nous nous sommes installés sur le pont, enlacés. Le héron était parti.

J'étais à ce moment là, lovée dans la chaleur humaine après des heures de pèlerinage solitaire, recrachant une fumée de la même couleur que mes songes, très proche d'une forme d'amour considérée comme pur, incroyablement vide et incroyablement pleine.  



mardi 26 avril 2016

vingt et un plus un

occupation de la BNP à Toulouse. 20/04/16


Dix heures du matin. Dans le miroir, la personne en face de moi a des rides au coins des yeux, et des grandes cernes noires. Elles sont toujours là maintenant, que je dorme dix heures ou que je ne dorme pas, je suis "fatiguée de la vie", qui épuise, qui me jette dans les coins. Et j'ai des petites rides, des rides quand je souris, des rides d'espoir. Je me souris un peu pour voir.
Je m'étire. J'ai des courbatures un peu partout. Hier j'ai participé à l'occupation d'une banque avec Nuit Debout Toulouse pour protester contre la fraude fiscale entre autre choses, et pendant deux heures nous avons dansé comme des dingues à l'intérieur, à grands renforts de colliers de fleurs et de confettis. On s'est fait traîner dehors par les forces de l'ordre, pour moi c'était la première fois. J'ai fait la teuf dans une banque. Ca me fait marrer.
Hier j'ai croisé E., drôle de fantôme d'un passé douloureux et très fort. "T'as l'air épanouie" qu'elle me dit. Je lui ai répondu que je grandissais énormément, tous les jours, et qu'accessoirement j'en prenais plein la gueule mais qu'il me semblait que l'un n'allait pas sans l'autre. Elle a dit que j'avais sans doute raison. On a cessé de parler car l'Assemblée Générale de la Nuit Debout a commencé et qu'on voulait toutes les deux écouter. Puis je suis partie sans lui dire au revoir.
J'ai peu travaillé cette année, j'ai eu le temps de réfléchir à beaucoup de choses. Je sais désormais qu'il est indispensable que je vive debout et que je me batte. Je n'ai pas encore de certitudes sur la manière dont ça doit se faire mais ça se précise doucement. Tout dans mon corps est vivant et révolté, tout dans mon esprit me mène à la lutte.

Il pleut. Je suis toute seule. Je sais qu'à partir de maintenant je serai toute seule très souvent. Mais tout va bien. Hier j'ai fumé un joint. Ca faisait 7 mois que je n'avais pas fumé, que je me suis débarrassée d'une addiction qui me poursuivait depuis 5 ans. Oui décidément j'ai beaucoup de choses à fêter aujourd'hui.
Vingt-deux ans. Cet age trop symétrique ne me plait pas trop. Disons vingt et un plus un. Vingt et un bis. J'ai de l'espoir plein le bide, tellement que ça commence à faire vraiment mal.


dimanche 10 avril 2016

dimanche après-midi




Nos deux corps enchevêtrés 
dans le silence d'un dimanche après-midi
Et nos respirations qui se suivent, dans l'annonce d'un été, 
le printemps revenu
Putain, que j'aime vivre 
dans ce monde que j'ai construit
La peur abolie et les détresses disparues, 
Tranquille pause dans les combats
Ce pourquoi l'on s'est battu
Ceux pour qui l'on ne se battra pas
Se contenter d'être là
Ou tout est beau
Ou il n'y a rien à rater
Et rien à réussir
Ou il faut juste être là
être présente 
Car ce dimanche après-midi 
ne recommencera pas
Et tous les petits matins
Ou je me lève sans toi
Sont tous aussi pénibles
Et différents à la fois
Mais ce n'est pas aujourd'hui
Et même si c'est demain
Aujourd'hui tout va bien.