Par Arthur
Improvisation au piano, tandis que les autres vidaient les bouteilles de vin, de bière et de cointreau, on était bien auprès du feu à chanter des chorales comme des mômes. Illusion, on a demandé à Arthur de jouer la lettre à Elise, il soupire. Je hausse les épaules, les pianistes n'aiment pas la lettre à Elise. Comme si à mesure qu'ils savaient jouer, ils ne voulaient plus s'atteler aux morceaux simples et connus comme celui ci. Peu importe, la musique est si belle, le temps les pardonnera, à ces orgueuilleux. Le piano sait me faire pleurer. Ou peut-être est-ce le pianiste mais qu'importe l'émotion est là. Alors je roule un bedo en ecoutant bethov, la weed me donnera l'inspiration pour écrire, il faut l'espérer car je n'ai d'autre moyen pour m'exprimer que ces sales addictions qui m'emportent. Les touches du clavier sont mes notes de piano, leur musique répétitive me perd, fait s'affoler mes doigts et je sombre dans mes pensées pour les amplifier et les faire paraitre belles. Qu'est ce que la musique sans le sentiment, l'écriture sans la passion, toutes ces amertumes qui subliment nos habitudes, à en perdre le gout d'aimer. Pourquoi se perdre dans l'être humain si faillible quand nos arts sont parfaitement splendides. Je ne met pas ma plume à l'encrier, j'allume mon pc ainsi que mon joint et les mots se déchainent, me dépassent, m'enlisent et me font perdre le Nord, ou peut-être est le Sud, en tout cas j'ai la tête à l'envers et c'est agréable de se perdre au fil de nos pensées.
Quand la mort viendra, je lui servirai un verre en écoutant Schuman ou Bach. Je fermerais les portes et les fenêtres, et je lui ouvrirai mon ame. Les passions d'une vie que je n'ai fait que traverser, je lui montrerai mes cicatrices sur les poignets, les séquelles d'une vie qui a trop duré et qui n'en finissait pas de s'attarder, je lui dirait comme je l'ai attendu, comme je révais de la voir arriver. Je lui dirait que j'ai été heureuse, que c'était bien, j'ai pris du bon temps, j'ai bu quelques bonnes bouteilles, connu quelques personnes remarquables et vécu des événements agréables alors rien d'édifiant, mais une vie moyenne tout à fait acceptable. Mais moi je voulais faire dans le hors norme vous comprenez, j'étais née pour faire dans le grand, ou pour faire dans le très mauvais, mais pas du juste milieu, pas de la triste médiocrité. Alors la mort, je lui dirais que j'ai fait mon temps, et que j'ai bien vécu jusque ici, j'ai été plusieurs fois très malheureuse, à en avoir peur du noir, de moi même, de mon reflet dans le miroir, et des gens qui me voulaient du bien, j'ai été paranoïaque, brêve, illogique et sincère, j'ai été tout celà. J'ai connu les foudres, les hublots trempés, les parquets délabrés, les traces de mains d'enfants dans les escaliers, les larmes de ma mère, les rouges-gorge le matin, les préludes, le sang de mon gamin, la rage de vaincre et la haine d'avoir perdu. Quand la mort viendra, je pourrais m'en aller en paix, car j'ai fait tout ce que j'ai voulu faire, je n'ai pas transigé. Je lui demanderai de veiller sur les quelques personnes que j'aime encore, de ne pas laisser la vie trop les abimer et les rendre amers. Je me roulerais une clope et on s'en ira.
Gabrielle