"L'apparence n'est rien, c'est au fond du coeur qu'est la plaie" Euripide

jeudi 22 janvier 2015

Solitude peuplée




Je ne sais si ce n'est par pudeur ou par peur de ne pas savoir parler d'eux assez bien qu'il y a certaines personnes que je n'évoque jamais et dont rien que le nom peut faire se briser ma voix contre une montagne de souvenirs heureux et tranchants. J'ai eu la chance de croiser sur ma route des gens qui ont su fermer les yeux sur mes vices, mes bassesses, qui ne m'ont pas jugé, qui m'ont accepté sans jamais me forcer à rien d'autre qu'à toujours ouvrir mes yeux et à réfléchir avec plus de bienveillance. Des gens qui m'ont appris à m'aimer en m'aimant eux même, qui m'ont considéré avec attention et patience, m'ont aidé à mettre sur pieds mes projets et les accomplir. Je craint de parler d'eux et d'en écorcher le souvenir, ne pas retranscrire exactement tout ce qui a pu se passer et combien je leur dois, à tout ceux qui malgré mon obstination, ma mauvaise foi, mes colères et ma tristesse n'ont jamais cessé de me faire confiance et de me guider quand je demandais de l'aide. Ils m'ont aimé au plus mal, ils m'ont appris l'amour quand je les rejetais, le pardon quand je  me haïssais, la douceur quand je hurlais. J'ai érigé des remparts autour de mon âme et ils les ont toujours respecté sans jamais les franchir. J'ai eu peur d'eux comme aujourd'hui j'ai peur de ne jamais les retrouver. J'ai compris trop tard.

Je t'entend encore m'expliquer patiemment : "La politique ça n'appartient pas qu'aux politiciens ou à une histoire de gauche ou de droite, loin de là, chacune de mes actions, chacun de mes choix est politique. Tout est politique.". J'ai mis du temps à comprendre ce que tu voulais dire, et aujourd'hui je me demande encore si on peut raisonnablement vivre comme ça, dans des espaces ou rien n'a vraiment de valeur ou de sens,  faire de ses choix ses armes, ses convictions ses batailles, s'associer à d'autres qui croient comme nous pour devenir plus grands, rejeter l'inutile... C'est tout ce à quoi j'aspire mais je ne peut m'empêcher de me demander si c'est viable et de me dire que tu aurais répondu à mes questions si tu étais encore là. 
Vous avez transformé ma vie. Vous m'avez appris à tout questionner, toujours. A ne jamais se satisfaire de réponses incomplètes, ne jamais rien admettre juste parce que c'est comme ça, toujours vouloir tout comprendre, parce que comprendre c'est déjà résister dans un monde ou si peu essaient. Vous m'avez réappris à jouer, "le jeu c'est la base de tout apprentissage", j'entends si bien vos voix et vos rires, "ah c'est marrant ça", toujours rire, parce que tout n'est qu'un jeu. Vous m'avez démontré, sans jamais en prononcer les mots, votre foi en l'éducabilité de toute personne, en commençant par la mienne.

 


lundi 12 janvier 2015

Hétéronomie




Chez l'être humain, l'hétéronomie représente l'impossibilité concrète ou l'incapacité morale à se donner ses propres lois et à se régir d'après elles ; l'autonomie est chez l'humain la faculté de vivre et d'agir selon ses propres forces, motivation et morale. Source

Je ne peut m'en séparer. Il est là parfois même quand je ne l'attends pas, que je le fuis ou que je le cherche il reviens toujours. Parfois il déserte ma route, mais jamais longtemps, jamais assez.
Jamais en paix, jamais seul avec soi même. Toujours cette présence en arrière plan comme une brume installée dans l'esprit. Un rempart entre la douleur du monde et moi, ne me permettant que de me concentrer sur la mienne, si peu véritable. Cette douleur grandit chaque jour à son contact, me coupe les jambes et me prive de mes forces, pourtant c'est maintenant plus que jamais qu'il faut se battre. Il n'est pas trop tard pour le secouer, l'envoyer bousiller d'autres destins. Il n'est pas trop tard mais il est si insistant. Impossible de le sortir de ma tête et de rejeter une certaine idée que je me fais de la fatalité. Car mon mépris un peu triste est encore teinté d'affection pour cet ancien ami adoré par le passé, qui fait aujourd'hui plus de mal que de bien.
Quand je l'évite, il me rappelle à son existence le plus souvent possible. Il me traque jusque dans mon sommeil, s'invitant dans des nuits noires de peur et d'insomnie. Quand je joue avec des gosses, je peut penser à autre chose, mais lui ne m'oublie jamais. Il connait tous mes amis, s'entend très bien avec certains et nourris l'angoisse de ceux qu'il poursuit comme moi. Il règne en despote sur des contrées imaginaires et instaure l'hétéronomie de chacun de ses sujets. Nous ne sommes plus totalement maitres de nos décisions. Nous ne sommes plus totalement libres.

Alors je ne sais pas ou je dois chercher la volonté et le courage d'arrêter la machine, je ne sais pas quand je parviendrai à m'écarter de cette influence néfaste et à me défaire de mon ambivalence à son égard, mais il est nécessaire de le faire. Parce que je ne veux pas me regarder prendre peur lentement jusqu'à être paralysée de terreur. Je l'ai laissé rentrer dans ma vie, et un jour il faudra bien lui demander de la quitter.




samedi 3 janvier 2015

La peur comme complice




Quand c'est la peur qui choisit pour toi, tu n'es qu'une raclure. Laisser la peur prendre les décisions c'est la fin du libre arbitre. Je pense que énormément de gens agissent en fonction de ce qui les effraie : la peur de ne plus avoir d'argent, la peur d'avoir l'air étrange, de ne plus être aimé ou reconnu, la peur de ne pas être comme tout le monde... Ne plus pouvoir se fondre dans la masse. Ce n'est pas l'idée d'être comme tout le monde qui me rend malade, c'est celle que tout le monde puisse souhaiter être pareil. 
La souffrance est un sentiment universel connu de tous les êtres vivants. Je ne peut me résoudre à me dire que je pourrais avoir tort quand j'essaie de guider mes actions de manière à causer le moins de souffrance possible. Je n'ai pas l'impression que je répare mes blessures ou que je tente de me donner bonne conscience. Au contraire je crois que les blessures s'élargissent. Mais comment accepter d'être complice ?

Ce serait plus reposant d'être "adapté", conforme à servir des desseins imaginés par d'autres que nous, se glisser dans le moule et laisser filer. La sécurité d'être comme tout le monde, dans un monde modérément froid. Une capacité infinie à fermer les yeux sur tout ce qui pourrait secouer l'équilibre des croyances dans lesquelles on s'abrite. Ce serait si simple de se protéger en refusant de voir ou d'admettre ce que souffre le monde pour que nous puissions vivre un quotidien sans prise de positions. Se draper dans l'hypocrisie de ceux qui ne savent pas, ne savent jamais, ceux qui ne veulent pas savoir. Ne pas choisir.

A ceux qui se mettront en quête d'un absolu en rejetant le saint juste milieu, sauveur des consciences, la route est longue et parallèle à la folie. Démontrer une incapacité à penser ou agir selon la norme témoigne d'une personnalité instable. Sont sains d'esprits ceux qui ne remettent pas le fonctionnement en question tandis que ceux aux prises de l'extrémisme sont des sujets pensés comme en crise, voire dangereux. En vouloir au genre humain s'apparente à la schizophrénie. Dans l'imaginaire collectif, la frontière est mince entre exclu et sénile, militant et violent, différent et débile.

Alors il y en a qui se jurent de ne jamais renoncer à la liberté. Il y en a qui agissent. Qui refusent de rester dans leur coquille et tentent à tout prix d'éclore, et de donner un sens aux choses. Qui se réveillent après des années passées sous un chloroforme institutionnalisé à l'échelle du monde et tentent de le regarder autrement. Et qui sans se laisser prendre à l'utopie de croire qu'ils vont tout changer, refuseront jusqu'au bout d'être complice de mauvaises actions générales. Tout ceux là ont en commun d'espérer et de garder la foi en la capacité de chacun à s'éduquer et à devenir la personne qu'il est réellement dans l'idée d'un bien commun.

Si on juge que la norme est mauvaise, notre folie aux yeux des autres nous apparaitrait-elle comme une preuve de santé mentale ?


jeudi 1 janvier 2015

Merci

2015




« Il y a quelque chose d’inguérissable qui traverse chaque vie de part en part et n’empêche ni la joie ni l’amour. » C. Bobin