Danseuse |
Je sais pas.
Le koala d'Alexandre m'observe sur le mur en face de moi. Je l'ai enfin obtenu ce foutu koala. Ça faisait un an que je le voulais, depuis que Alexandre s'était mis à la peinture et avait peint ce koala. Mais j'en ai bavé pour l'obtenir, hein, parce que un coup il était réservé pour quelqu'un d'autre (une fille avec qui il voulait baiser sans doute, bref), un coup je passais chez lui pour le prendre et Alexandre n'était pas là (ça arrive régulièrement) et puis pleins d'autres trucs. Bon l'autre jour j'étais chez lui et je me suis rappelé de l'existence du koala, Alexandre a ouvert sa vieille pochette à dessin et Gaétane me l'a enroulée en tube pour pas l’abîmer. Je me suis trimbalée chez la psy avec, et à la sortie évidemment il pleuvait.
Et maintenant il est accrochée au mur, au dessus de mon bureau. Joli koala.
Noé va même plus se coucher dans son lit, il s'allonge sur le sol, et il ouvre plus un oeil. Je sais qu'il est pas mort parce qu'il respire mais quand même. Fait chier. Puis mon père croit que je boit trop alors que je fais juste une grosse rechute. Enfin, "juste". J'ai pas envie de demander du réconfort. Ca sert à rien de compliquer ce qui est déjà mal foutu. J'oscille. C'est ça le mot. Enfin peut-être.
L'homme est un animal, j'entends. Du coup en enchaînant les cigarettes, je me demande ou est passé mon instinct de survie. Des allers-retours en scoot. Encore des cigarettes. Un cookie, un café, un chapitre d'histoire. Tout ça, avalé à la va-vite, pour être mieux recraché plus tard, et pour ne pas être à la bourre.
J'entends la "moi"-gosse qui hurle de chagrin tous les soirs, quand ma mère me repousse, quand ma soeur m'insulte, et des personnes qui s'interessent à moi pour les mauvaises raisons m'ignorent, de lassitude. L'an dernier je passais mon oral de bac d'anglais, puis mon père prenait 60 balais très loin de la maison. Il est revenu depuis, et tout est passé tellement vite.
A quoi ça tient? un sourire, un coup de fil, en pleine écriture de son drame, de l'herbe, une chanson, mais pas n'importe la quelle. Non. Ce serait trop facile. Mais si tout pouvais l'être, si on pouvait desserrer ses doigts sans se tordre le poignet de douleur, si l'air de Paris remplaçait les bouffées de weed, si on avait toujours quelqu'un à frôler de la main à 4 heures du matin... Peut être que tout irait mieux, si c'était pas déjà le chaos. Si on avait un plan de secours.
J'aimerais que quelqu'un comprennes, mais je n'ai pas envie de me raconter. Avoir à parler, encore. A expliquer aux gens qui on est et ce que l'on veut. Ils n'y comprennent jamais rien. Des fois comme ça, j'ai envie que ce soit l'hiver et qu'il fasses -5 degrés pour avoir une bonne raison de ne pas sortir. Mais non, avec 25 à l'ombre, je suis obligée de me traîner à l'extérieur, assurer le minimum syndical: une bise, deux sourires, trois cafés, quatres mots, cinq clopes. Et finalement rentrer, gober un calmant, faire un cauchemar, et relancer le compte à rebours jusqu'au prochain calmant.
Je ne sais toujours pas quoi dire d'intéressant.
J'aurais peut-être du m'en tenir au koala.